LA WONDERSWAN Article rédigé par Romain

Le logo de la WonderSwan Sur le marché des consoles portables des années 90, la Game Boy a régné de manière incontestée. Elle a eu même un tel succès que l'expression "Game Boy" fut utilisée pour désigner n'importe quelle console portable. Dans ce dossier, je vais pourtant vous parler d'une autre console portable pas très connue par chez nous, mais qui a quand même réussi à faire un peu trembler la portable de Nintendo : il s'agit de la Game Boy de Bandaï, enfin je voulais dire la WonderSwan !


> La naissance de la WonderSwan

Gunpei Yokoi, l'inventeur de la WonderSwan, est aussi à l'origine de nombreux succès de Nintendo, comme les Game & Watch et la Game Boy ! Nombreux sont les constructeurs à avoir voulu faire de la concurrence à Nintendo en sortant leur propre console portable sans réel succès : à l'époque des débuts de la Game Boy, Sega avec sa Game Gear ainsi qu'Atari avec sa Lynx avaient fait le pari de proposer des consoles plus performantes avec des écrans couleurs, mais qui se sont révélées plus coûteuses et particulièrement voraces en piles. Bien plus tard, SNK faisait un autre pari avec sa Neo Geo Pocket, dont l'écran du premier modèle est monochrome avant un passage à la couleur pour la Neo Geo Pocket Color... Mais en 1999, une console arrive sur le marché avec de plus sérieux atouts pour concurrencer Nintendo sur son terrain : il s'agit de la WonderSwan, une console pas comme les autres puisque l'homme qui est à l'origine de celle-ci n'est autre que Gunpei Yokoi, un des pères de la Game Boy - parfois considéré un peu abusivement comme son créateur.
On peut alors se demander pourquoi Gunpei Yokoi avait voulu faire de la concurrence à une console qu'il a lui même contribuée à créer. En 1996, Gunpei Yokoi démissionne de Nintendo, et on a longtemps pensé que la raison principale de ce départ était la conséquence directe de l'échec commercial de la Virtual Boy - le plus important même de Nintendo. Pourtant, il a quitté la firme de Kyoto pour qui il a tant contribué (les Game & Watch, c'était également lui) après la sortie en 1996 de la Game Boy Pocket. En réalité, cette décision s'explique par son désir de prendre son indépendance et de s'atteler à des projets plus modestes qui lui tiennent à coeur : il crée ainsi sa propre société, Koto Laboratory !
Parmi ces projets, l'idée de créer une nouvelle console portable, l'objectif n'étant pas de produire une machine puissante mais une console qui permettrait d'apporter de l'innovation dans la manière de jouer. Malheureusement, en 1997, Gunpei Yokoi décède lors d'un accident de voiture, et c'est Yoshihiro Taki - un autre membre de l'équipe de concepteurs de la Game Boy - qui prend alors la direction de Koto Laboratory. Celui-ci décide de conserver les exigences de Gunpei Yokoi concernant la conception et le design de la console. Après plusieurs mois de travail, la WonderSwan est enfin créée !

Une console originale, puisqu'elle peut se tenir aussi bien horizontalement que verticalement. Son écran est également un des plus grands de l'époque (6,3 cm de diagonale et une résolution de 224x114 pixels). Autres atouts : la WonderSwan est très légère (93 grammes) et bénéficie d'une très grande autonomie, puisqu'elle est capable de tenir une trentaine d'heures avec une seule pile LR6 ! Le seul inconvénient de la console sera son écran en noir et blanc, alors que Nintendo a déjà commencé à commercialiser sa Game Boy Color... Mais rappelons que l'objectif n'était pas de créer une console plus "puissante" que les autres, mais plus innovante.


> Koto Laboratory rejoint Bandai

La WonderSwan rencontre immédiatement un bon accueil au Japon Afin de distribuer au maximum sa WonderSwan, Koto Laboratory s'associe avec Bandai (un des plus gros fabricants de jouets au Japon) qui avait justement l'intention de rentrer sur le marché des consoles portables. En étant distribuée par Bandai, la WonderSwan bénéficie alors d'énormes avantages, notamment grâce à toutes les licences que possède la société (comme Dragon Ball, Saint Seya, Gundam et beaucoup d'autres). De plus, beaucoup de studios tombent sous le charme de la WonderSwan : on peut citer Konami, Capcom, Namco, Koei, Taito, mais aussi SquareSoft, en froid avec Nintendo depuis que la firme de Kyoto a décidé de nombreuses mesures de représailles à la suite du développement de Final Fantasy VII sur PlayStation.
Avec tous ces avantages en poche, la petite console de Bandai est prête à faire face à la Game Boy, d'autant plus qu'à son lancement, la WonderSwan est distribuée à un prix très bas : 4800 yens soit environ 35 euros. La Game Boy n'a qu'à bien se tenir !

La WonderSwan est commercialisée le 4 Mars 1999, et en une semaine, ce ne sont pas moins de 200 000 consoles qui sont écoulées. Des consoles portables "non Nintendo", seule la PSP à sa sortie parviendra à réussir un tel exploit ! A son lancement, la portable dispose déjà de nombreux jeux, dont Digimon Adventure, une licence créée par Bandai pour concurrencer Pokémon. Et la liste des jeux sortant sur cette portable s'allonge très rapidement, la dotant d'une ludothèque confortable : en moins de 2 ans, la WonderSwan accueille 109 jeux, dans des genres variés et avec plusieurs licences connues.

Gunpey - dont le titre rend hommage à Gunpei Yokoi - est le puzzle game maison de Koto Laboratory, et un des jeux qui permet de jouer en tenant la WonderSwan verticalement SquareSoft propose son adaptation de Chocobo Mystery Dungeon dès le lancement de la WonderSwan Autre jeu de lancement, Digimon Adventure sort en 2 versions, de manière similaire à ce qui a été fait pour Pokémon Makaimura for Wonderswan est un épisode de la série Ghosts 'n Goblins spécialement développé pour la portable de Bandai

La WonderSwan rencontre donc un joli petit succès, et Nintendo, qui n'aime pas trop qu'on lui fasse de la concurrence sur le domaine des consoles portables, ne va pas tarder à réagir.


> Une version Color pour tenir face à la réponse de Nintendo

Face à la Game Boy Advance, Bandai a lancé la WonderSwan Color Face à une WonderSwan qui se vend plutôt bien, Nintendo annonce en 2000 l'arrivée de la Game Boy Advance, qui sera bien plus puissante que la Game Boy Color ! Alors que la WonderSwan est en noir et blanc, Bandai va devoir trouver une solution pour pouvoir continuer à faire face à cette nouvelle portable. C'est alors qu'ils décident de créer une WonderSwan avec un écran couleur : la console se nommera tout simplement WonderSwan Color et sera commercialisée le 9 décembre 2000 au prix de 6800 yens (environ 50 euros). La nouvelle console est bien sûr entièrement compatible avec les jeux de la première WonderSwan. Grâce au soutien de SquareSoft qui sort un remake du premier Final Fantasy en édition collector, la WonderSwan Color connaît un succès immédiat, et ce seront pas moins de 300 000 consoles qui seront vendues en quelques jours !
Rapidement, la WonderSwan Color dispose d'une ludothèque propre intéressante : outre Final Fantasy mis en avant comme system seller, Digimon Adventure 2, Gunpey EX ou encore une adaptation de Guilty Gear accompagnent le lancement de la portable.

Le remake de Final Fantasy sur WonderSwan Color, pièce maîtresse du lancement de la portable Naruto, comme beaucoup d'autres licences, a eu son adaptation sur WonderSwan Color Guilty Gear Petit a été développé pour la WonderSwan Color par Arc System Works La WonderSwan a également eu droit à sa version de Tetris, bien adaptée au mode vertical

Mais Nintendo n'a pas l'intention de se laisser faire et bénéficie d'autres atouts. Big N dispose en effet du soutien d'un studio et pas des moindres, puisqu'il s'agit du grand rival de SquareSoft : Enix, qui va alors sortir l'adaptation de Dragon Quest III sur Game Boy Color un jour avant le lancement de la WonderSwan Color ! Quelques mois plus tard, Enix poursuit avec Dragon Quest Monsters 2 sur Game Boy Color, et SquareSoft, ne comptant pas en rester là, va sortir un remake de Final Fantasy II en réponse. La lutte entre SquareSoft et Enix va bien sûr se faire ressentir au niveau des ventes de consoles. Porté par le soutien de SquareSoft, Bandai parvient à vendre environ un million et demi de WonderSwan Color en un an, et sur le seul marché nippon.
Bandai réussit même à avoir le soutien de Sony qui développera le WonderWave, un accessoire qui permet à la WonderSwan de se connecter à la Pocket Station de la PlayStation pour certains jeux (notamment Digimon). Bandai aura donc tout tenté pour tenir face à Nintendo, et pourtant, la Game Boy Color se vend mieux, notamment grâce au soutien d'Enix.

Le pack Collector de Final Fantasy ! SquareSoft proposa également un pack collector avec Final Fantasy II ! Fruit d'un partenariat avec Sony, le WonderWave fixé à la WonderSwan permet de se connecter avec la Pocket Station


> La fin de la WonderSwan

La Game Boy Advance arrive finalement le 21 mars 2001, bien trop vite pour laisser les ventes de WonderSwan Color progresser. Bandai, déjà en difficulté face à la stratégie de Nintendo de soutien constant à la Game Boy Color, se prend alors une énorme claque puisqu'en quelques mois, Nintendo réussit à vendre autant de Game Boy Advance que Bandai aura vendu de WonderSwan depuis la sortie de la première version ! Pire : hormis SquareSoft qui continue de soutenir la console en sortant des remakes de ses classiques (Romancing SaGa, Front Mission et Final Fantasy IV), les grands éditeurs nippons se reportent tous sur la Game Boy Advance dès son lancement. Bandai se retrouve ainsi quasiment seul pour alimenter en jeux sa WonderSwan Color, qui comptera tout de même 90 jeux exclusifs.

La SwanCrystal, une version améliorée de la WonderSwan Color qui n'aura pas eu autant de succès Coupé dans son élan et ne parvenant pas à rattraper les seules ventes de la première WonderSwan, Bandai tenta un dernier essai en ne développant pas une nouvelle console mais en sortant une version améliorée de la WonderSwan Color : cette nouvelle portable se nomme SwanCrystal, et est commercialisée le 12 juillet 2002 au prix de 7800 yens (environ 57 euros). Cette nouvelle version est bien sûr toujours compatible avec tous les jeux des anciennes WonderSwan et bénéficie d'un écran TFT de très grande qualité. Mais cela ne changera rien pour Bandai, qui ne peut que constater le faible nombre de ventes de ce dernier modèle. La compagnie annonce quelques mois après la sortie de la SwanCrystal ne produire des nouveaux exemplaires qu'en fonction des commandes des distributeurs, et - aveu d'échec cinglant - développer des jeux pour les consoles de Nintendo ! C'est le 18 Février 2003 que Bandai annonce officiellement l'abandon complet du développement des WonderSwan.


> Conclusion

Dommage que Bandai n'ait jamais essayé de sortir sa console en dehors des frontières japonaises, contrairement à une autre concurrente de l'époque, la Neo Geo Pocket Color. Mais il faut bien avouer qu'avec des jeux issus pour la plupart de licences de mangas et de séries typiquement japonaises, la WonderSwan n'aurait sûrement pas eu le même succès qu'elle a pu avoir au Japon ! On peut tout de même les féliciter d'avoir essayé de se mesurer à Nintendo sur son terrain de prédilection, mais Nintendo a montré que c'était lui et lui seul qui dominait le marché des consoles portables !

Un autre acteur du jeu vidéo a toutefois profité de ses expérimentations avec la WonderSwan pour concurrencer à son tour Nintendo : il s'agit bien sûr de Sony, qui lance fin 2004 la PSP. En concurrence avec la DS de Nintendo, cette console parvient au terme de sa commercialisation à faire jeu égal avec les ventes de la Game Boy Advance, et rencontre notamment un succès important au Japon. De là à parler d'héritière de la WonderSwan, c'est un pas que je ne franchirai tout de même pas : si la PSP était conçue initialement comme un bijou technologique multimédia, les modèles de WonderSwan sont des consoles dédiées uniquement au jeu vidéo, proposées à des tarifs très abordables.

Quant à Bandai, le relatif échec de la WonderSwan est toutefois bien loin de marquer le retrait de la compagnie du monde du jeu vidéo, et la société a finalement fusionné avec Namco pour devenir un géant nippon du jeu vidéo et du divertissement, Bandai Namco Holdings Inc.

A lire : Tous les avis sur les jeux sortis sur les consoles WonderSwan.

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