SAVAGE REIGN & KIZUNA ENCOUNTER Article rédigé par Kim

King Lion a la main mise sur la ville de Jipang ! On est tous (enfin pour ceux d’environ notre âge...) passé devant une borne qui proposait le dépaysement total. Des jeux qu’on ne pensait même pas avoir chez soi, pensant que le seul moyen d’y jouer, était d’insérer une pièce de 5 ou 10 Francs dans la fente. Un de ces jeux, le plus souvent de la baston (2D ou beat’em all), qui se caractérisait par des « bonhommes » de tailles gigantesques servis par une palette de couleurs flashys ahurissantes. Des titres dont on ne se souvenait jamais du nom et qui étaient jouables que dans des bars enfumés à l’époque. Et bien la série des Fu’un est de cette race : pour y accéder, rien de tel que de se diriger vers la Neo Geo, qui en compte une bonne pelleté ! Bien sur, on peut se retourner vers d’autres softs. C'est le début du tournoi ! Mais ni Fatal Fury ou Samurai Spirits (personnages trop petits), ni World Heroes (difficile d’accès et qui partagera sans doute les opinions), ni King of Fighters (graphismes trop fins) n’est selon moi le plus représentatif de l’image du jeu d’arcade qui rend fou dès les premiers tâtonnements de stick. Reste bien évidemment Art of Fighting, qui pour l’occasion transcende la bécane en terme de sprites, mais qui, à mon goût, est un brin moins impressionnant concernant l’impact des combats et le punch de ceux-ci. Savage Reign et Kizuna Encounter sont deux jeux qui se suivent et regorgent de pleins d’innovations pour plaire et satisfaire les férus de jeux mystérieux comme seule l’Arcade avec un grand A peut en cacher ! Bienvenue dans le doux monde de la castagne !


> Savage reign ou le jeu aux belles trouvailles

Savage Reign Dans un futur proche, début du 21ème siècle et l’organisation du Battle of Beast-God, grand tournoi se déroulant au cœur de la ville de Jipang (et non Southtown, comme on peut se permettre de penser), tel est le point de départ de Fu’un Mokujiroku (titre japonais de Savage Reign). Durant le 20ème siècle, l’état instable de la cité (on parle peut-être d’une guerre dans le prologue) a vu émergé plusieurs races de combattants. C’est à ce moment là que le mystérieux King Lion surgit et délivra un message à travers tous les écrans : « En ce jour, j’appelle tous les guerriers de la ville pour participer à mon tournoi, le Battle of Beast-God ! Les guerriers qui survivront auront l’immense privilège de se battre contre moi ! Celui qui parviendra à me vaincre sera récompensé d’une gloire et d’une richesse éternelle ! ». Dans ce cadre semi-apocalyptique, un héros se détache du lot des 10 participants. Son nom : Hayate. Sa spécificité : pratiquer le Fu’un Ken, un art martial plutôt étrange qui combine karaté et l’art du maniement du boomerang ! Voyons maintenant pourquoi ce titre signé de l’association Neo Geo et SNK est, selon moi, si exceptionnel.

Le jeu de baston : style qui oppose un combattant contre un autre dans une arène où seul le plus fort vaincra. Voilà la base commune à bien des titres de ce type. Pourtant les créateurs de jeux vidéo nous sortent de nouvelles variantes à chaque fois pour faire en sorte de faire évoluer le genre. Partant d’un Street Fighter basique, mais néanmoins accrocheur et qui se tournera au fil des opus vers un dynamisme à toute épreuve, il y a eu Fatal Fury : son combat en 2 contre 1 et son système de plan (deux puis trois à partir du troisième épisode). Art of Fighting et son sens du combat de rue qui a fait fureur proposant une barre pour recharger son énergie et l’apparition des bleus ou cocards pendant les affrontements. Samurai Spirits avec ses armes blanches ou encore Killer Instinct et ses combos délirants. Bref, chaque série possède sa marque de fabrique. Or, on apprendra au fil des paragraphes que Savage Reign ne représente pas une grosse révolution et qu’il se contente de copier ses prédécesseurs. Là où le jeu fait pourtant fort, ce sont sans doute ses détails croustillants qui en font un incontournable.

Le zoom, très pratique pour des attaques à distance ! En effet, on est même en mesure de dire que le premier de cette petite série n’est en fait qu’un mix de plusieurs autres jeux, leur piquant pour l’occasion ce dont pourquoi ces derniers ont eu tant de succès ! On parlait de personnages gigantesques et bien Savage Reign a çà. Le zoom, grande nouveauté par le biais de AoF ou Samurai Shodown, fait partie des grands atouts que possèdent Fu’un Mokujiroku. Deux guerriers s’éloignent et la perspective est lointaine ; par contre, lorsqu’ils se rapprochent, on peut s’émoustiller en regardant la beauté des graphismes montrant tout en détail les nuances de couleur et l’animation. Les matchs au corps à corps sont vraiment à tomber tant par les impacts de coups lorsque l’un des persos se fait toucher que par l’envergure de ces combattants dotés de muscles saillants comme le laisse voir le King Lion ou Hayate.

Certaines techniques sont magnifiques, admirez la taille des sprites ! Nouveau point, cette fois, concernant les plans. Comme dit auparavant, c’est Garô Densetsu qui a inauguré cette déclinaison. Des plans pouvant servir d’esquive donnant une autre dimension au combat. Le jeu qui nous intéresse ici en possède, cependant leur utilisation demeure moins sommaire et devient plus subtile allant avec ce que nous verrons plus tard, à savoir les armes que détienne chaque personnage. Qu’est-ce qui diffère tant ? Et bien dans Fatal Fury, toute la surface se situait au même niveau, tandis que là, le second terrain de jeu se trouve à un niveau supérieur donnant une certaine profondeur appréciable pendant l’affrontement de deux guerriers. Il faut dire aussi que dans ce fameux premier épisode de la série mythique Made-in-SNK, les plans donnaient l’impression d’être mal gérés. Autrement dit, un personnage passant de l’autre côté faisait un bon énorme pour se retrouver semble-t-il que quelques petits mètres ou centimètres plus en arrière et ce, sur la même ligne. Dans Savage Reign, tout est limpide : le combattant se trouvant en haut a une taille plus réduite, celui de dos bénéficie d’un plus gros sprite et la distance les séparant semble bien plus proportionnelle. Bref, du bonheur pour les yeux !

Perchés en hauteur, le combat continue. Les lanternes deviennent aussi des armes. Autre copiage notable dans Fu’un Mokujiroku : les éléments extérieurs. On pourrait ainsi se rappeler World Heroes et son Death Match. Mais qu’est-ce que le Death Match ? Une arène toute spéciale (il faut savoir aussi qu’un autre choix était possible avec une arène simple) truffée de pièges comme des murs à pointes ou encore des mines posées à terre et qui réapparaissent. Pour revenir à SR, il ne s’agit pas complètement de pièges, mais il est néanmoins possible de se faire toucher par des éléments du décor. Lancés par un combattant ou tombant ou intervenant aléatoirement à cours d’un round, le danger est bien là, sans compter l’adversaire que vous devez affronter ! Ainsi, sur le ring de catch d’Eagle, le combat peut continuer à se dérouler avec les deux personnages suspendus au bout de l’installation électrique pour l’éclairage située bien évidemment au niveau supérieur ! Ils peuvent donc se donner des coups du moins jusqu’à ce que l’un deux (celui touché en premier) s’écroule à terre. Là où le combat devient innovant, c’est que celui qui est resté perché en haut se voit doté d’une toute nouvelle arme : celle des projectiles et dans cet exemple, il s’agit des projecteurs de lumières. Ce dernier a donc le pouvoir de donner des coups sur ces objets qui se dirigeront immédiatement vers le combattant au sol ; cependant, il y en a un nombre limité. Et ce n’est pas la seule variante que l’on peut noter dans le jeu. En effet, d’autres stages regorgent d’autres petits évènements tous plus différents les uns que les autres. Dans le décor de Chung (le Tortue Géniale du jeu), le principe est à peu près le même que dans l’exemple d’Eagle. Au cœur de la fête foraine du côté de chez Carol, c’est carrément le Grand 8 que vous devrez esquiver pour ne pas perdre des points. Dans la base scientifique de Nicola le petit génie, c’est une passerelle électrique qui pourra peut-être vous surprendre. Pour finir, les glaces infernales (The Ice of Inferno – l’antre de Mezu, l’un des ninjas) cacheront des vagues de piranhas et des stalactites, cette fois pouvant vous transpercer au premier plan. Voilà ce qui démontre que Savage Reign sait être novateur en reprenant certaines idées d’autres de ses concurrents ; et même avec cet amas d’imitations, que l’on pourrait juger plutôt comme étant des petits réajustements de concept, le jeu sait sortir son épingle pour nous proposer un soft des plus rafraichissants.

Tel l’unique Samurai Shodown, qui n’est plus vraiment si unique maintenant et au fil du temps, Fu’un Mokujiroku bénéficie d’armes que l’on peut ici lancer à son opposant. En pressant les boutons B et C, il vous est donc possible de projeter le pouvoir propre à chaque combattant de façon accroupi, debout ou en sautant ! Hayate et son boomerang, Gordon et sa matraque ou Joker et ses cartes magiques que renferme son chapeau bourré de surprises qu’il a préparé spécialement pour vous, SR innove à sa façon le genre. Il faut compter aussi sur l’effet des plans, où un combat peut vite tourner à une vraie partie de tennis, car justement, un simple coup fort permet de renvoyer le projectile de son adversaire et ce, d’un plan à un autre aussi donc. Petit décalage il y a, vous en conviendrez, entre les katanas de Samurai Spirits et les armes de Savage Reign, ce qui nous laisse penser en concluant le tout, que le jeu, en prenant des petites caractéristiques d’autres jeux de baston, s’est créé une âme propre en ne ressemblant finalement à aucun autre et ce, en tenant comptant de ses détails qui font la différence.

La matraque de Gordon aura-t-elle raison de Gozu ? Pour citer ses autres valeurs intrinsèques et pour s’amener vers une certaine critique, détaillons le plaisir de jeu de façon objective. Nous avons vu le principe de jeu, mais quant est-il des autres facteurs ? Comme dit précédemment, les graphismes font penser à du manga et sont renversants de beauté. Côté maniabilité, Fu’un Mokujiroku s’installe dans la grande lignée des autres softs Neo Geo, ceux avec des combinaisons improbables exécutables pour sortir ces bonnes vieilles Furys des familles qu’on idolâtre tant. Cependant, avec un nombre de guerriers assez limité, le jeu peut laisser un goût amer, surtout vu son prix en AES. Cela est d’autant plus vrai que le style psychédélique des personnages surprend pour ne pas dire qu’il choque ! Une danseuse de GRS, un papy au look de djeuns, un gros policier poilu de la trempe d’un Zangief (en plus bedonnant !) ou encore un boss et un demi-boss en armure affublés de gants de boxe, cela ne laisse pas beaucoup de place ! C’est un genre peu orthodoxe qu’il se donne, mais Savage Reign a dans sa besace Hayate, le perfide Nicola ou encore le duo Gozu/Mezu entre autres, ce qui donne un fifty-fifty question capital sympathie et il a au moins le mérite d’être un type de jeu amusant et délirant ! Côté musique, le jeu est encore une fois très bon, surtout sur Neo Geo CD. * Sur le ring d’Eagle, le combat est sur le point de commencer ! Du thème jovial de Joker, rappelant sa folie, au thème très hard-rock de Gordon, en passant par le son très électronique de Nicola du à ses inventions tel que son arme, le « Discus of Death » (littéralement, le Disque de la Mort !), tout est magnifiquement bien orchestré. Pour finir, la difficulté s’accroit de niveau en niveau pour arriver à un grand chef à base de coups prioritaires qui vous feront mordre la poussière. Petite note, enfin, pour la conversion CD, le jeu qui ne change pratiquement pas d’un poil, est pourtant agrémenté de petites notes d’humour pendant les temps de chargements ; avec des messages de tous les combattants, notamment Carol qui révèle ses mensurations, Chung nous donnant son secret de longévité à base d’œufs ou le héros au boomerang prodiguant que son pouvoir vient de son cri légendaire : Heeeeeuuuuuuhhhhaaaaaaahhh ! (comme il le fait si bien durant l’introduction).

Regardez la passerelle électrique en haut à droite. L’un des éléments extérieurs dont il faudra se méfier... Un an plus tard, une suite peu commune de Savage Reign voit le jour, son nom : Kizuna Encounter (Fu’un Super Tag Battle). Peu commune, tout d’abord, puisqu’elle ne s’appelle pas Savage Reign 2, mais aussi car le principe de jeu diffère complètement. Cependant, plus des trois quarts des personnages du premier sont présents dans le second, ce qui créé une liaison non négligeable avec l’opus d’avant.


> Kizuna Encounter : le Graal pour tout fan !

Kizuna Encounter Le scénario de Fu’un Super Tag Battle est pratiquement le même que celui de Fu’un Mokujiroku. Se déroulant dans la même ville (Jipang), un nouveau tournoi (toujours appelé « The Battle of Beast-God ») est organisé et chaque participant a sa propre raison d’y prendre part. Dix combattants étaient présents dans Savage Reign, dix combattants le sont aussi dans le deuxième épisode. Et dans ce remaniement de roster, c’est Carol et Nicola qui s’en vont pour laisser la place aux styles ravageurs de Kim Sue-il (Kim Young-Mok, descendant de Kim Kaphwan, preuve de l’amour de SNK pour ce personnage de Fatal Fury et fidèle athlète de King of Fighters, ayant eu sa propre équipe) et de Rosa, seule femme au tableau et à eux deux, les nouveaux héros de la série, dixit l’introduction. Le style graphique est le même a ceci près qu’il est un peu plus sombre, ce qui enlève le côté psychédélique, détaillé avant, mais qui donne un nouveau ton obscur imagé par des ruelles salles et autres usines et chantiers désaffectés. De plus, nouveau petit détail qui change tout et qui intervient dans Kizuna Encounter, c’est le compteur de Hit Combo. Même si Savage Reign ne possédait pas ce compteur, il était néanmoins possible d’enchainer des coups ajoutés à certaines techniques de combat. Cependant, on voit que des enchainements inédits apparaissent dans Fu’un Super Tag Battle. Coup de pied sauté, enchainement de coups de poings et coups de pieds, puis techniques ou Furys, voilà le genre de création que vous pouvez produire ! La jouabilité, quant à elle, est d’une limpidité impressionnante ! Un simple novice qui essaierait le jeu pour la première fois, est tout à fait capable de sortir rien qu’un petit 3-hits. Seules les Furys (que l’on peut trouver sur internet, si acheté en MVS non Full Kité) relèvent de l’impossible -même si elles sont plus simplifiées qu’avant- et fait appel à un certain mérite imaginaire, celui d’être capable de savoir exécuter ces manips tortueuses !

Kim Sue-il ou Young-Mok, nouveau héros dans cet épisode. Comparons maintenant les deux épisodes. Dans Savage Reign, on pouvait changer de plan, faire une Super Attaque ou lancer son arme, à travers ceux-ci ou bien à distance sur le même sol. On pouvait jouer des « ennemis » extérieurs à la façon World Heroes... Désormais, tout cela est effacé ! Dans Kizuna Encounter, il n’y a déjà plus de plan, mais la révolution se trouve autre part et nous verrons cela plus tard. Certes, Hayate dispose toujours de son boomerang, King Lion (ou King Leo, bien évidemment) de sa Sword of Leo ou Gordon ou encore Chung peuvent toujours lancer leur pouvoir grâce à respectivement sa StantonFar (matraque) et/ou sa Cane of Flames (cane ayant la possibilité de cracher des flames), mais l’aspect « jeu avec armes » à été complètement revu. Le choix est limité à 10 combattants. Ici, tous les personnages ont une arme, mais on ne peut plus la lancer comme avant. Il est difficile en effet d’imaginer Kim Sue-il lancer son bâton (Kim ne s’appelle pas Billy Kane !) ou Rosa de lancer son katana ! Outre cette petite différence dans ce deuxième opus, notons tout de même des petites nouveautés comme l’esquive (AB en même temps), le passage dans le dos (avant + AB en même temps, reprise de Samurai Shodown III), le brise garde ou encore la garde dans les airs. Des minuscules petites améliorations, donnant un peu plus de technicité aux combats, mais encore une fois, rassurons-nous elles ne sont pas les seules au tableau, sans compter les différents attraits de ce jeu déjà exceptionnel !

Rosa en prend pour son grade ! Et la musique dans tout çà ? Elle est bonne, même excellente ! SNK nous a toujours habitué à du son violemment métallique sur sa bête d’Arcade. On a droit à ce même type de traitement sur le jeu ; cela tombe bien puisqu’elle est en total accord avec les espaces lugubres et l’action. Un son purement « coup de poing » et diablement rythmé qu’il n’a d’égal que le jeu en lui-même. A noter qu’il n’y a pas eu de version CD, les amoureux des retouches CD ne seront sans doute pas déçu de cette petite touche percutante qu’obtient la musique lorsqu’on l’écoute ! Il faut savoir aussi que, qui dit « jeu de baston Neo Geo », dit grand boss de fin accompagné d’une grande musique... Et c’est ici le cas, l’ambiance sonore de King Leo (l’un des deux grands boss de Kizuna) est mémorable ! -notamment reprise dans The King of Fighters 2000 version Dreamcast-